L’Enfant et les Sortilèges de M. Ravel

D’abord conçue comme argument de ballet, L’Enfant et les Sortilèges, composé de 1920 à 1924, est constitué de deux parties et s’articule autour d’un argument simple : dans sa chambre, un enfant se rebelle contre les directives maternelles. Dans sa colère, il brise tout ce qui lui tombe sous la main puis contemple le désordre. Or, chaque jouet cassé, chaque meuble saccagé, chaque animal mutilé prend la parole pour lui révéler l’égoïsme de sa conduite. D’abord stupéfait, il s’effondre enfin au
fond du jardin, épuisé et désolé. Témoins de son repentir, ses victimes rassemblent alors leurs forces pour appeler à sa place : « Maman ! ».
L’Enfant et les Sortilèges est une succession de tableaux indépendants mêlant une multitude de genres musicaux, du jazz au foxtrot en passant par un ragtime, une polka, un duo miaulé, une valse et, en conclusion, un choral sacré. Plus proche des
actuelles comédies musicales que d’un opéra, L’Enfant et les Sortilèges est une oeuvre sans équivalent dans le répertoire ravélien. Il exprime la sensibilité du compositeur en même temps que son goût pour la féerie. Son art s’accommode à merveille avec l’humour et le non-conformisme de Colette. Mais comme souvent avec les oeuvres singulières, l’accueil fut mitigé lors de la création, le 21 mars 1925, devant le public monégasque. Pourtant, le succès de cet opéra, aussi bien auprès des enfants que des adultes (car les niveaux d’interprétation sont nombreux), ne s’est jamais démenti depuis.